Rencontrée sur Instagram, nous avons interviewé Caroline, régisseuse dans un musée ! Kesako ? Nous avions une vague idée, mais grâce à Caroline tout s’éclaire (et nous donnerait presque envie de changer de métier). Après avoir lu son interview, foncez la suivre sur Instagram pour découvrir les coulisses de son métier !
Côté métier …
Bonjour Caroline, merci beaucoup, entre deux oeuvres, de prendre du temps pour nous ! Peux-tu te présenter à nos lecteurs ?
Je m’appelle Caroline Lenoir. J’habite dans l’Est de la France. Multi-passionnée, je m’intéresse à énormément de choses : l’art, le cinéma et les loisirs créatifs sont mes principaux hobbies. J’aime m’émerveiller depuis toujours et suis très attachée aux vestiges du passé. C’est d’ailleurs ce qui m’a amené à faire des études en histoire de l’art et à faire mon métier actuel.
Quel est ton métier ?
Je suis régisseuse des collections dans un musée de Nancy, le musée Lorrain – Palais des ducs de Lorraine.
Peux-tu le présenter à nos petits lecteurs ?
La régie des collections est un métier qui permet d’être en contact avec les œuvres d’un musée. Cela consiste à analyser physiquement les objets, à les déplacer et les accrocher pour une exposition ou pour toute autre activité quotidienne d’un musée (accueil de chercheurs / restaurateurs par exemple).
Pour préparer une exposition, le régisseur s’occupe d’organiser toute la logistique technique et administrative. Il rédige des courriers, fait des demandes d’assurance, des plannings et organise le déplacement des œuvres en voiture, camion et parfois avion. C’est un métier où il faut être mobile : nous pouvons aller chercher des œuvres en France comme à l’étranger ! Pour chaque déplacement, il faut donner des prérogatives adaptées à l’œuvre comme le type de conditionnement pour son transport par exemple (création de caisse sur mesure ou tamponnage).
Le régisseur travaille en équipe car il faut être minimum deux personnes pour déplacer une œuvre d’art. Pour cela, il travaille parfois avec des transporteurs spécialisés. D’ailleurs on déplace et accroche des œuvres de toute tailles / formes / poids. Ça peut être une fourchette en argent comme une grosse statue de plus de 400 kg ou un tableau de 3 x 2 mètres (ou plus).
Pour préparer une exposition, le régisseur ne fait pas qu’aller chercher les œuvres. Avec le conservateur ou la conservatrice, il réfléchit à comment les présenter, les socler ou les mettre en vitrine. Cela permet de valoriser et sécuriser les œuvres. Il peut aussi échanger avec des restaurateurs si les collections sont un peu « fatiguées » ou si elles demandent un traitement spécial.
Au quotidien, le régisseur s’occupe de la vie des collections. Il réalise les rotations (changements) des œuvres en salles permanentes. Il peut aussi s’occuper du récolement décennal. Une de ses principales missions est de faire le maximum pour que les œuvres ne s’abîment pas et qu’elles puissent traverser les époques. On appelle ça, la conservation préventive. Il fait attention à plein de choses : le climat, la lumière, la poussière… et travaille dans une réserve spécialement conçue pour les œuvres d’art. Il entretien les collections en faisant du dépoussiérage mais aussi en réalisant des conditionnements adaptés. Tout ça pour qu’un objet très ancien puisse être visible aujourd’hui, demain, dans 5 ans, 10 ans, 100 ans et plus.
C’est un métier polyvalent avec lequel on ne s’ennuie jamais !
Depuis quand souhaites-tu faire ce métier ?
Depuis toute petite ou presque ! J’ai toujours aimé l’art et l’histoire. Au départ, je voulais être artiste et puis, je me suis dit qu’il y en avait de bien meilleurs que moi… J’ai toujours été fascinée par les vieilles choses et j’aimais déjà garder des objets et souvenirs quand j’étais enfant. Aimant l’art, c’était presque une évidence (même si je ne savais pas comment ce métier s’appelait enfant !).
Côté art …
Quel est ton premier souvenir dans un musée ?
Mon premier souvenir, tout du moins celui qui me vient à l’esprit, est une sortie scolaire en école primaire. Nous étions allés au musée des Beaux-Arts. Je me souviens qu’une médiatrice nous avait fait une visite guidée. J’avais été particulièrement marquée par une œuvre contemporaine peinte sur un des murs du musée. Je me souviens m’être dit « c’est incroyable de pouvoir peindre ça dans un musée au milieu de tous ces vieux tableaux ».
Quelle est ton oeuvre préférée dans toute l’histoire de l’art ?
Mon œuvre préférée est l’Autoportrait de Léon Cogniet peint vers 1817-1818 et conservé au Musée des Beaux-Arts d’Orléans. Je suis une grande amatrice de peinture du 19ème siècle qui est d’ailleurs mon siècle de spécialité. De manière générale, j’aime beaucoup les portraits et autoportraits car ils nous donnent à voir l’image que voulaient laisser les personnes représentées. Ils nous font découvrir la mode vestimentaire d’un temps donné, les activités qu’aimaient la/les personne(s) du tableau, leur métier etc.
Alors pourquoi j’aime particulièrement l’autoportrait de Léon Cogniet ? Car il montre un jeune homme plein d’aplomb, au regard frontal, sûr mais pas trop, avec une moue rappelant sa jeunesse.
C’est un portrait très classique dans sa composition mais je le trouve vraiment captivant, de par le traitement de la lumière et la mise en valeur du visage : la chemise blanche mais surtout le foulard rouge apporte une vraie force. Ce dernier me capte totalement. La coiffure du jeune homme apporte aussi un certain dynamisme. Elle est à la fois conventionnelle et fougueuse. L’ensemble de ces éléments me font aimer cet autoportrait et délivrent, pour moi, le message d’une jeunesse qui ne fanera jamais. C’est ma façon de lire ce portrait, un peu à la manière d’un Dorian Gray à l’Oscar Wilde, la « folie » en moins ! Depuis quelques temps, le musée remet en doute le fait que cette peinture soit l’autoportrait de l’artiste. Personnellement, je me laisse à croire qu’il est bel et bien celui de Léon Cogniet… Les preuves, si elles existent, nous permettront peut-être de le vérifier un jour (ou pas). C’est aussi ça l’art dans un musée : chercher les faits tout en ayant le droit de rêver !
As-tu un souvenir d’art à nous partager ?
Lorsque j’avais l’âge de 6 ans, j’ai gagné un concours de dessin organisé par ma Ville de l’époque. Ce concours était organisé pour illustrer le futur bulletin annuel de la municipalité. Ils avaient lancé ce concours auprès des écoles et c’est moi qui ai eu le premier prix ! J’étais vraiment fière et intimidée. Mon dessin allait tout de même être la couverture de l’année et… j’allais passer dans le journal ! C’était la première fois que je gagnais quelque chose en lien avec ma passion (le dessin). Je me rappelle avoir reçu un livre sur les dinosaures mais surtout une grosse boîte rouge contenant tout le nécessaire pour dessiner !
Quel musée visité récemment conseilles-tu à nos petits lecteurs ?
Il y a quelques mois j’ai pu visiter le Museum d’Orléans le temps d’un week-end (le même où j’ai pu enfin voir en vrai la peinture dont je parle plus haut). J’ai beaucoup aimé cet endroit qui, je trouve est très pédagogique. Les salles sont peintes en noires et des multimédias donnent une impression d’immersion.
L’ensemble du parcours est ponctué d’objets et de tables manipulables qui permettent de mieux comprendre ce que l’on nous explique /présente. Il y a aussi comme pour tout museum des animaux et autres spécimens surprenants. Je trouve cela vraiment intéressant pour le jeune public (mais pas que !). Il est ainsi plus facile de s’approprier un univers pas si différent du nôtre.
Le dernier étage se compose d’un espace de lecture et de jeux. On peut donc choisir à sa guise un livre ou un jeu de société pour prendre le temps de s’amuser en famille ou avec d’autres enfants. C’est vraiment top ! Et « clou du spectacle », il y a une grande fourmilière dans cet espace ! On peut suivre ces petits insectes et voir comment est-ce qu’ils évoluent seuls ou en collectif… C’est un peu une métaphore de cet espace finalement : un lieu où l’on peut s’isoler pour se construire son univers, son savoir, ou alors décider de partager son temps avec d’autres et construire ensemble des souvenirs communs.
Un grand merci Caroline !
Osez l’art ! Osez l’art pour les enfants !
